Le grand retour des samouraïs dans les jeux vidéo
Dossier
PUBLIÉ LE 20 juil. 2020

Le grand retour
des samouraïs
dans les jeux vidéo

Crédit : Sony
Maxime L-G.
Maxime L-G.
Auteur Micromania-Zing
PUBLIÉ LE 20 juil. 2020

Entre Sekiro et Ghost of Tsushima, il semble que le samouraï soit revenu en odeur de sainteté dans le jeu vidéo. Mais qu’est-ce qui explique qu’il ait disparu auparavant ?

Le samouraï, ce guerrier traditionnel japonais au katana et grandes armures de plaques, est naturellement très représenté dans le jeu vidéo. Il est assez simple d’expliquer sa présence : il s’agit d’une figure historique majeure du Japon. Et les constructeurs et développeurs japonais ont fait l’histoire du jeu vidéo, les Sony et Nintendo de ce monde ayant mené la démocratisation du loisir dans les foyers mondiaux. Jeux vidéo + samouraï = cœur ? Pendant quelques temps, ce ne fut plus vraiment le cas.

La simplicité de l’épée

Les ères 8bits et 16bits cherchaient l’efficacité et la simplicité, du fait de leurs limitations techniques. Si la puissance des consoles n’empêchait pas les titres d’être magnifique, leurs ambitions scénaristiques étaient naturellement bien plus limitées. Aussi, les principes aussi simple que “tir, découpe, saute” étaient naturellement favorisés. Quoi de mieux pour habiller cela que de créer un univers facilement reconnaissable pour tous, inspiré du réel ? C’est là que la culture samouraï, plus généralement la culture historique japonaise, a pu trouver immédiatement sa place. Les samouraïs étaient omniprésents : qu’il s’agisse de capacités pour vos personnages dans les RPG tels que Final Fantasy ou Dragon Quest, de boss stylés comme dans Ninja Gaiden ou tout simplement d’incarner un samouraï comme dans First Samuraï, tout sentait bon le katana et la découpe. Quelques shurikens en bonus tout de même, puisque les ninjas avaient un peu plus la cote dans l’imaginaire collectif. N’oublions pas non plus l’arcade, où The Last Blade comme Samurai Shodown étaient parmi les expériences les plus marquantes pour leur réalisation et leur univers.

L’ère 3D n’a pas véritablement changé la donne, mais a permis de maximiser encore plus l’impact visuel des techniques et environnements utilisés. Sur PlayStation, la série Tenchu a notamment marqué pour sa capacité à montrer un Japon féodal et l’évolution d’un ninja dans ce monde rempli de samouraïs. Sur PlayStation 2, Capcom y a ensuite ajouté sa sauce avec Onimusha, ou “le samouraï contre les démons” comme on pourrait le définir plus largement. Ninja Gaiden a continué de la sorte, et sa transformation en 3D l’a poussé à tirer plus du côté du samouraï que du ninja côté gameplay. Genji, Way of the Samurai, Musashi : les titres étaient légions, car la culture japonaise était dominante sur consoles de salon à cette époque.

Crédit : Capcom

Lassé du Japon

Alors, qu’est-ce qui a changé ? Absolument tout. Lors de l’ère PS3/Xbox 360, les jeux vidéo sont devenus intégralement connectés, et les titres indépendants ont pullulé sur les magasins dématérialisés gérés directement par les constructeurs. Le marché du jeu vidéo a connu une énorme vague : celle du jeu mobile. Au Japon, les consoles portables ont toujours été reines, du fait que le grand public a toujours été habitué à jouer dans les transports en commun. De la Game & Watch à nos jours, c’est une habitude ancrée dans les mœurs. Cependant, l’explosion des smartphones a entaché l’idée de posséder une console portable du côté des consommateurs, mais aussi de dépenser des milles et des cents en développement du côté des créateurs. Tout cela s’est couplé avec le fait que les attentes des consommateurs occidentaux de cette ère n’étaient pas nécessairement liées au savoir-faire acquis par les créateurs nippons jusque là.

Ces derniers ont aussi eu du mal à négocier un virage difficile : celui de l’augmentation drastique des coûts de production des jeux vidéo. Alors que la plupart des éditeurs occidentaux se tournaient vers des moteurs gérés par des tierces, comme l’Unreal Engine pour ne citer que lui, la culture de développement japonaise avait plutôt pour habitude de créer son propre moteur. Le sentiment général était que les créateurs japonais étaient “en retard” sur les développeurs occidentaux. Le résultat général a été que la culture occidentale a été plus proéminente sur cette génération, alors que le Japon subissait de multiples crises qui l’empêchait de retrouver son élan. Certains sont partis en masse sur le mobile, d’autres se sont focalisés sur les consoles portables. Et une petite frange a fait le pari risqué d’occidentaliser ses productions habituelles, ce qui a déplu aux fans de la première heure : on pense tristement à Bomberman dans ce cadre. Naturellement, le samouraï a doucement disparu des esprits au profit des Call of Duty de ce monde. Seuls ont subsisté les marronniers : les Dynasty Warrior, Sengoku Basara et autres “musou” comme on les appelle, qui vivent depuis toujours d’un noyau dur de fans bien installé.

Crédit : Activision

Le phoenix renaît toujours

Qu’est-ce qui explique alors que le samouraï soit de retour ? Le regain d’énergie des développeurs japonais. Après avoir subi cette ère difficile et organiser de nombreux changements en interne, les Capcom et autres Square Enix de ce monde sont revenus avec une vengeance à assouvir. From Software a ainsi pu revenir à ses premiers amours en offrant un successeur spirituel de Tenchu : Sekiro. Square Enix a pu faire d’un délire typiquement japonais mélangeant robots, soubrettes et katanas l’un de ses plus gros hits de la génération : NieR Automata. Et bien sûr, Sony a pu valider la création d’un titre baigné dans l’histoire du Japon et faisant tout pour utiliser les pleins pouvoirs de la PS4 : Ghost of Tsushima.

Cependant, le retour du samouraï dans les jeux vidéo ne se fait pas dans le même contexte. Le dernier jeu cité en est une preuve : Ghost of Tsushima a beau être nippon de cœur, il est développé par le studio américain Sucker Punch. Il devient donc synonyme du véritable changement que cette période nous a offert : une plus grande mondialisation du jeu vidéo, où occidentaux et asiatiques travaillent main dans la main à créer les meilleurs titres.

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