Ces consoles de jeux qui n’ont jamais vu le jour
Dossier
PUBLIÉ LE 11 janv. 2021

Ces consoles de jeux qui
n’ont jamais vu le jour

Crédit : SEGA
Nico Prat
Nico Prat
Expert Micromania-Zing
PUBLIÉ LE 11 janv. 2021

Peut-être possédez vous l’une des dernières consoles de la nouvelle génération. Peut-être êtes vous davantage portés vers le retrogaming, votre Dreamcast ou votre Atari toujours branchées. Ou bien peut-être les deux. Mais une chose est certaine, vous n’êtes en aucun cas en possession de la Taito WoWoW ou de la Red Jade, et ce pour une raison toute simple : ces consoles n’existent pas.

Et pourtant, il s’en est fallu de peu. L’enfer vidéoludique est pavé de bonnes propositions, de projets arrivés trop tôt, ou mal pensés dès le départ. Parfois, tout cela n’est qu’une affaire de fric et souvent, d’un manque de chance, ou tout simplement d’un mauvais timing. Petit passage en revue de projets avortés, pour des raisons bien différentes (et parfois nébuleuses) mais qui racontent à chaque fois quelque chose de l'industrie et de ses ambitions.

Infinium Labs Phantom (2004) ou des histoires de gros sous

Sur le papier, la proposition était grisante : une console de salon capable de lire n’importe quel jeu PC disponible sur le marché aujourd’hui et demain, proposant ainsi, sans même forcer, un catalogue de lancement à faire pâlir de jalousie les concurrents. Bonus : la Phantom devait proposer des jeux uniquement en téléchargement et la possibilité de les tester avant achat. Problème : la console n’est pas prête en 2004, pas plus qu’en 2005 ou en 2006, année où le projet est finalement abandonné. Pourquoi ? La rumeur dit que le directeur de Phantom lui-même aurait en fait vanté les mérites de sa machine pour booster les actions de la compagnie, tout en sachant que son produit n’avait pas d’avenir. C’est un délit (il dut payer une amende de 30.000 dollars), et ce fut l’ultime clou dans le cercueil de la bête. Une affaire de gros sous et de tambouille interne qui n’est pas sans rappeler l’échec de l’Indrema L600, qui en 2001 devait, sous Linux, proposer des jeux en open source (ainsi qu’un lecteur DVD, un enregistreur, etc…). Manqueront dix petits millions de dollars pour que le projet trouve son financement, et puisse éventuellement rivaliser avec la Playstation 2 et la Dreamcast.

Crédit : Infinitium Labs

Sega VR (1993), ou des projets trop en avance

Si même en 2021 la VR peine à s’imposer dans les salons malgré toutes ses promesses (parfois tenues mais pas toujours), imaginez un peu ce qu’il en était en 1993. Prévu pour un lancement à la fois sur Arcade et consoles de salon (la Genesis mais aussi potentiellement la future Saturn), le projet de casque de réalité virtuelle de Sega ne vit finalement le jour que sur bornes. Pourtant, avec un prix relativement abordable de 200 dollars et quatre jeux au lancement, Sega VR avait tout pour lui. Alors quoi ? Alors au moment de l’annulation au printemps 1994, les dirigeants se justifient en affirmant le plus sérieusement du monde que les joueurs ayant pu tester le produit trouvaient le résultat trop réaliste, se blessant aux quatre coins de la pièce. Quiconque a déjà porté un casque semblable, même moderne, sait que ces mêmes joueurs étaient sans doute plus sujets à des vomissements qu’à des sensations trop fortes. Preuve que le futur doit parfois attendre, comme le savent bien les ingénieurs d’Atari, qui avec la Cosmos en 1981 ambitionnaient rien de moins que de délivrer des jeux en 3D (en fait deux hologrammes projetés sur des leds en mouvement, noble mais vain, le projet est abandonné avant sa mise en production, et seuls cinq prototypes existent encore à ce jour) ou ceux de Taito, titan des années 90, qui avec la WoWow souhaitait proposer des jeux en streaming.

Red Jade (2001) ou le marché de la console portable

Marché largement dominé par Nintendo et sa Game Boy (et déclinaisons) et aujourd’hui sa Switch, la console portable n’en a pas moins fait rêver beaucoup d’autres. En 2001, décidément une grosse année pour les annulations, Ericsson, l’entreprise suédoise de télécommunications fondée en 1876, annonce l’arrivée de la Red Jade. 10 millions de dollars de budget (c’est assez peu), GPS, connexion Internet, téléphone, mais aussi la possibilité de jouer à des jeux aux graphismes proches de ceux de la première Playstation sortie en 1994. Pas une mince affaire donc, six ans avant la sortie du premier iPhone. Même constat dix ans plus tôt, en 1991, quand Active Enterprises imagine une console portable, la GameMaster, permettant de lire des jeux Nintendo, Sega et CD Rom sur un écran couleur. Deux projets éminemment ambitieux, trop pour leur époque. Au rayon curiosité, il est intéressant de noter que le Musée du Jeu Vidéo de Frisco au Texas a lui en sa possession un prototype de Mini Vectrex, déclinaison de la Vectrex donc, développée par General Consumer Electronics, et immense fiasco financier, emportée par la crise du jeu vidéo de 1983.

Crédit : Active Enterprises

Nintendo/Playstation SNES-CD (1993) ou le mariage rêvé

Le rêve absolu des gamers de la planète, et ce depuis déjà plusieurs décennies. L’histoire est connue, elle conte la collaboration avortée entre Nintendo, déjà géant de la sphère vidéoludique, avec Sony, pas encore parent heureux de la Playstation. L’idée est alors de proposer un add-on à la SNES permettant de lire des jeux sur CD et non sur cartouches. Mais ne parvenant pas à arriver à un accord sur les licences, Nintendo, dans le dos de tout le monde, se rapproche de Philipps, et se fâche avec Sony, donnant ainsi naissance à la guerre des consoles telle que nous la connaissons encore aujourd’hui. Décidément, pas simple de travailler avec la maison de Mario : la même année, Bandai, qui cherche à se développer, annonce la Bandai HET, soit une console de chez eux capable de lire les cartouches SNES. Sans surprise, Nintendo préfère se concentrer sur sa GameBoy maison, et là encore, nous ne saurons jamais ce qui aurait pu être.